Après avoir étudié le français et l’art occidental aux Beaux-Arts de Tokyo, Tsuguharu Foujita quitte son Japon natal pour Paris. En s’installant en France, il cherche à rompre avec les usages ancestraux d’un pays trop codifié à ses yeux. Cet éloignement et la rupture qu’il entraine va lui permettre d’exister en tant qu’individu et en tant qu’artiste. Il développe un style personnel entre deux cultures : celle de son pays d’origine et celle de son pays d’adoption. Installé dès son arrivée à Montparnasse, il va se construire au contact de l’œuvre des artistes avant-gardistes qu’il fréquente : Modigliani, Van Dongen, Soutine, Derain ou Picasso. Ses premières œuvres mêlent un cubisme stylisé inspiré par Modigliani avec la tradition japonaise et un gout pour le gothique. Outre les natures mortes, quelques paysages, les portraits et les chats, il est surtout connu pour des nus féminins à l’étrangeté certaine. Il est excellent dessinateur et sa peinture à l’aspect de porcelaine est réalisée avec une pate fine appliquée au pinceau ou au tampon.
Très vite, il acquiert dans les milieux mondains une notoriété importante qu’il doit tant à son art qu’à sa personnalité fantasque ; son personnage excentrique avec frange japonaise et grosses lunettes noires entre dans la légende du Montparnasse des Années folles. Au cours des années 1930, il entreprend une série de voyages entre les Amériques et l’Asie, il est accueilli triomphalement à son retour au Japon et s’installe à Tokyo. Il retourne en France en 1939 mais la guerre l’oblige à regagner le Japon. Après plusieurs voyages à New York dans la Seconde moitié des années 1940, il revient définitivement en France en 1950.
Dès son retour, il s’installe dans un nouvel atelier à Montparnasse. Le quartier a changé mais il y retrouve certains de ses anciens amis : André Lhote, Jacques Villon, Maurice de Vlaminck…
Il travaille sans relâche et expose à la Galerie Paul Pétridès. Foujita reste très attaché à la figuration. Le cheminement de son œuvre se produit donc en marge des courants artistiques des années 1950. Ces années sont également celles d’un retour en grâce du paysage, auquel il s’exerce en Bretagne ou à Paris. Ses vues parisiennes représentent les lieux de ses premières années françaises. Cette nostalgie l’amène naturellement à peindre et dessiner son quartier de Montparnasse. La rue Vandamme, perpendiculaire à la rue de la Gaité, se trouve à quelques mètres de son nouvel atelier, derrière la ligne de train dont on aperçoit les piquets au-dessus du mur. Notre aquarelle à la perspective géométrique et très dessinée atteste du goût pour la ligne de Foujita, resté intact dans ses années de maturité. Les couleurs froides et la perspective vide donnent une douce mélancolie à ce paysage urbain, témoignage de l’attachement d’un artiste au quartier qui a fait sa gloire.
Vendu
Tsuguharu Léonard Foujita
1886–1968