Mort prématurément à Buzenval en 1871 dans les derniers jours de la guerre franco-prussienne, Henri Regnault connut une courte mais brillante carrière. Élève de Louis Lamothe, puis d’Alexandre Cabanel à l’École des beaux-arts, il obtient le prix de Rome en 1866 avec Thétis apportant à Achille les armes forgées par Vulcain. Il part alors pour l’Italie, son séjour à la Villa Médicis inaugurant quelques années de voyages qui le mèneront jusqu’à Tanger.
En 1868, Regnault séjourne en Espagne où il admire Diego Vélasquez et Francisco de Goya. Il y réalise des aquarelles représentant d’abord la population locale dans des études de figures isolées, puis de superbes vues architecturales. Le palais de l’Alhambra à Grenade le marque profondément et devient une source d’inspiration féconde pour le décor de son dernier grand tableau, L’Exécution sans jugement sous les rois maures de Grenade (ill. 1), peint en 1870 à la Villa Médicis. Plusieurs aquarelles dépeignant l’intérieur du palais font partie de ses chefs-d’œuvres graphiques. Notre feuille, par sa taille, sa composition et son ambition en est l’un des plus beaux exemples, et se rapproche de deux autres aquarelles conservées au musée du Louvre : Entrée de la Salle des deux Sœurs à l’Alhambra de Grenade (ill.2) et Intérieur du Mirador des deux tours. Notre dessin est une vue de la porte de la cour des Lions, l’un des lieux les plus emblématiques de l’Alhambra ; elle doit son nom à la fontaine ornée de douze lions en son centre, visible au fond de l’aquarelle.