Sculpteur d’origine belge installé dans le Nord de la France, Eugène Dodeigne apprend le métier dans l’atelier de son père marbrier. Il étudie ensuite à l’École des beaux-arts de Tourcoing à la fin des années 1930, avant de passer quelques années à Paris où, de 1943 à 1946, il étudie à l’École des beaux-arts et se passionne pour les arts premiers. De retour dans le Nord, il prend part au Groupe de Roubaix dans les années 1950 et 1960. D’abord sculpteur sur bois, il se consacre rapidement à la pierre qu’il sculpte en taille directe, s’intéressant essentiellement à la figure humaine et aux torsions du corps, qu’il représente en groupes monumentaux. Artiste majeur de l’art figuratif de la seconde moitié du 20e siècle, son œuvre est aujourd’hui représenté dans de nombreux lieux publics et collections à travers le monde.
Le dessin est une composante essentielle de l’œuvre sculptée, s’inscrivant dans le processus créatif : « Je traduis dans la pierre l’émotion née au moment du dessin »1. Les dessins ne sont pas directement préparatoires aux sculptures mais sont l’occasion d’une première impulsion. Cette dynamique va de pair avec la saisonnalité contrainte du travail de Dodeigne - l'artiste ne pouvant travailler ses pierres monumentales qu’en été. « À partir de novembre, je remplis donc des carnets de croquis et, au bout de quelques semaines, finit par se dégager ma ' tendance ' de l’année. Je réalise alors des grands dessins, des formes que je pense pouvoir traduire dans la pierre. J’en modèle aussi de petites esquisses en terre cuite. Et à partir de mars, je peux enfin […] reprendre mes outils et attaquer la pierre »2. Dodeigne dessine souvent sur de grandes feuilles des figures fantomatiques aux corps contorsionnés, au fusain, et plus rarement, comme ici, à la sanguine et à la craie blanche sur papier coloré.