Ambroise Duchemin
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Sam Szafran

1934–2019

L’Imprimerie Bellini la nuit

Fusain et traces de sanguine sur papier
760 × 560 mm
Provenance :
Galerie Jacques Elbaz, Paris
Collection particulière, Paris
Versailles Enchères, Versailles, Importants Tableaux Abstraits et Contemporains, Sculptures, 16 décembre 2012, lot 221
Collection William Louis-Dreyfus, New-York
The William Louis-Dreyfus Foundation and Family Collections, transmis par descendance, 2016
Sotheby’s, Paris, Art Contemporain, Vente du Soir, 8 juin 2022, lot 13
Exposition :
Genève, Artel Galerie, Szafran Pastels, 1974, n°6

Sam Szafran, Samuel Berger de son vrai nom, naît en 1934 à Paris. Issu d’une famille immigrée, juive et polonaise, il vit les premières années de son enfance dans le quartier des Halles. Lors de la Seconde Guerre mondiale, Szafran parvient à échapper à la rafle du Vel’d’Hiv de 1942. Déporté dans le camp de Drancy à l’âge de 10 ans, il perd une grande partie de sa famille dans les camps de concentration. À son retour à Paris, Szafran suit des cours du soir dans les écoles d’art avant d’entrer à l’Académie de la Grande Chaumière en 1953. Lors de ses pérégrinations à Montparnasse et à Saint-Germain-des-Prés, il croise de nombreux artistes, tels que Nicolas de Staël, Yves Klein et Jean Tinguely. Sa rencontre avec Alberto Giacometti - figure tutélaire pour Szafran - au début des années 1960 est déterminante. En 1964, il entre à la Galerie Claude Bernard, et présente sa première exposition personnelle chez le marchand Jacques Kerchache en 1965.

En 1970, Szafran reprend avec trois associés une imprimerie de lithographie située au 83 rue du Faubourg Saint-Denis. Après avoir édité à la fin du 19e siècle des œuvres de Henri de Toulouse-Lautrec ou Théophile-Alexandre Steinlen, elle s’était concentrée sur les affiches de cinéma. Szafran lui donne le nom d’Imprimerie Bellini en hommage au maître vénitien de la Renaissance. Szafran n’utilise quasiment pas les machines mais s’imprègne de l’ambiance du lieu dont il tire une série de pastels, invitant le spectateur à arpenter et redécouvrir l’imprimerie. « La beauté des machines m’intéressait par-dessus tout, l’ambiance, la perspective, cet énorme trapèze de lumière qui changeait selon la direction, avec un rez-de-chaussée, où on faisait la gravure, où il y avait le laboratoire pour la gravure, et puis en sous-sol toutes les machines, ce qu’on appelle les bécanes, le massicot, etc. C’était magnifique. Le sujet de mon travail s’est précisé là. Je m’y plaisais énormément dans cette imprimerie, qui était d’ailleurs très belle »1. L’artiste représente la verrière, les presses, les outils et les pierres lithographiques. L’artiste représente l’escalier en plongée - la pièce visible dans une encadrure au fond de la composition en est le point de fuite. C’est à travers la représentation de ces marches, ces marches menant à l’atelier souterrain, que ce motif prend une nouvelle dimensions dans son œuvre, annonçant la série des escaliers initiée au 54 rue de Seine en 1974. De jour comme de nuit, Szafran répète et varie sur ce même sujet, qu’il traite jusque dans les années 2000. L’escalier descendant au sous-sol devient un leitmotiv.

Les premières représentations de l’imprimerie et de son escalier, au début des années 1970, dont fait partie notre dessin, sont parmi les plus grands chefs d'œuvres de Szafran. Comme l’écrit James Lord : « Les vues intérieures de l’imprimerie Bellini représentent le point culminant de l’attitude esthétique de Szafran. Subjectives, elles restent pourtant objectives. La vision intérieure est projetée en une expression extérieure. (...) Son articulation n’est pas liée à un espace euclidien vide, mais à un espace ayant ses propres caractéristiques, ses propres structures symboliques, qui permettent au spectateur de placer son existence et ses sentiments en relation avec un concept à la fois physique et idéal »2.

1 Sam Szafran. Entretiens avec Alain Veinstein, 2013, p. 171
2 James Lord, « Szafran. La valeur du réel », L’Œil, n° 216, décembre 1972, p. 49
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